Homélie - "Le nom de Dieu est miséricorde" 24e dimanche C 2019

Homélie
2019/09/11
Homélie - "Le nom de Dieu est miséricorde" 24e dimanche C 2019

24e dimanche C 2019 
« Le nom de Dieu est miséricorde. » 
Homélie
(Ex 3,7-11.13-14 ; Tm 1,12-17 ; Lc 15,1-10)

Trois paraboles qui vont ensemble, qu’on ne doit pas séparer. Deux petites : la brebis perdue et retrouvée, la pièce d’argent perdue et retrouvée ; une troisième, plus longue et très connue, le fils perdu et retrouvé. On a là tout le chapitre 15 de l’évangile de saint Luc, composé uniquement de ces trois paraboles, et on pourrait les résumer chacune en deux mots : miséricorde et joie.

Dans la première, un homme a cent brebis, mais voilà qu’il en perd une. Il laisse là les 99 autres et se met à la recherche de la brebis perdue. Quand il la retrouve, il court l’annoncer et on fait la fête. Jésus a alors cette parole étonnante : Il y aura de la joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se convertit, plus que pour 99 justes qui n’ont pas besoin de conversion.

Même chose pour la parabole de la pièce d’argent. Une femme n’a que dix pièces d’argent et elle en perd une. Vite, elle allume une lampe, passe le balai partout dans la maison, et retrouvant sa pièce d’argent, sa joie éclate. Jésus termine cette parabole comme la précédente : Il y a de la joie devant les anges de Dieu pour un seul pécheur qui se convertit.

Il en est de même pour la parabole du fils perdu et retrouvé qu’on appelle habituellement la parabole de l’enfant prodigue, mais qu’on devrait plutôt appeler la parabole du père miséricordieux. Le père attend ce fils qui l’a quitté et s’en est allé avec son héritage mener une vie fort décevante. Dès qu’il l’aperçoit venir au loin sur la route, le père est saisi de compassion et court se jeter à son cou. Et aussitôt, c’est la fête.                                  

Trois paraboles sur la miséricorde de Dieu à l’égard des pécheurs. Elles se terminent toutes les trois par les mêmes paroles, un peu comme un refrain : Réjouissez-vous avec moi, car j’ai retrouvé ce que j’avais perdu. Et dans la troisième, ce refrain est comme renforci par cette parole dite deux fois : Mon fils que voilà était mort et il est revenu à la vie. … Ton frère que voilà était mort, et il est revenu à la vie. Il faut de plus remarquer que Jésus parle à son fils aîné de la même personne, mon fils, ton frère. Pour Dieu, Père de miséricorde, tout pécheur qui revient à la maison est son fils, mais il est aussi notre frère.

Le récit de saint Luc commence en mettant en présence deux groupes de personnes venues écouter Jésus, des publicains et des pécheurs qui devaient sûrement accueillir ces paraboles avec plaisir et des pharisiens et des scribes qui faisaient part entre eux de leur désaccord. On peut penser que ces trois paraboles de Jésus s’adressaient aux uns et aux autres et peut-être plus particulièrement aux scribes et pharisiens, sachant bien qu’ils étaient de ceux qui se considéraient comme faisant partie de ces 99 justes qui n’avaient pas besoin de conversion et auxquels Jésus pensait sûrement quand il a introduit le fils aîné dans sa troisième parabole. Jésus n’a pas cessé de déranger ces gens qui se prétendaient justes et il ne cessera pas au cours des siècles, et encore aujourd’hui, de déranger ceux et celles qui croient en lui mais ne sont pas vraiment fidèles à conformer toute leur vie à l’Évangile.

Jésus nous présente à travers ces trois paraboles le vrai visage de Dieu, ce visage de Dieu vers lequel le pape François veut tellement que nous nous tournions et que nous fassions connaître. Rappelons-nous qu’en 2016 il a voulu que toute l’Église consacre toute une année à redécouvrir, à faire savoir au monde que le nom de Dieu est miséricorde, ce sont les mots qu’il a alors employés. Le berger qui retrouve sa brebis, la femme qui récupère sa pièce d’argent, et le père qui voit revenir son fils, non seulement manifestent leur joie, mais ils invitent à la partager. Cet appel à la joie, on peut aussi le voir comme un appel qui nous est adressé, un appel à la conversion, un appel à passer d’un souci trop tourné vers soi, d’une recherche trop centrée sur son propre bonheur, à un désir vrai de le partager avec les autres. La réaction du fils aîné nous fait bien voir que cela n’est pas si facile. Remarquons toutefois que, s’il refuse de se réjouir du bonheur de son père, de partager sa joie, il n’est pas pour autant rejeté. Son père sort du lieu de la fête pour parler avec lui, tout comme le Christ est sorti de sa condition divine pour venir partager notre détresse, comme l’écrit saint Paul dans sa lettre aux Philippiens.

C’est du péché que Jésus nous parle dans ces paraboles, mais il faut remarquer qu’il ne parle jamais du péché sans parler en même temps de la miséricorde. Le fils perdu devient capable de dire : Père, j’ai péché contre le ciel et envers toi. Je ne suis plus digne d’être appelé ton fils, lorsque son père se jette à son cou et le couvre de baisers. Ce n’est pas le péché qui est important, mais l’amour du père pour son fils. On ne découvre pas le vrai sens du péché si on ne fait que regarder ses attitudes, ses comportements, ses actions, même si on en est attristé. Seul l’amour de Dieu peut faire reconnaître le péché. Ce doit être pour cela que nous nous reconnaissons pécheurs au début de chaque célébration eucharistique, parce que nous nous rassemblons pour célébrer l’amour du Père pour nous, manifesté en Jésus dans le don de sa vie. Nous reconnaissons alors qui nous sommes en présence de Dieu, des enfants devant leur père qui les aime. 

N’est-ce pas là le vrai sens de la Porte sainte, de la Porte de la miséricorde, toujours là présente dans la cathédrale de Québec. Même si elle est fermée, nombreux sont les pèlerins qui de partout viennent y prier chaque jour. Elle demeure un appel à la conversion, un appel à nous tourner davantage, avec encore plus de vérité, vers Dieu notre Père, ce Dieu dont le nom est miséricorde, ce Dieu qui nous attend et nous accueille tous avec tellement de joie.

Marc Bouchard, prêtre