Homélie - Dimanche de Pâques 2021

Homélie
2021/03/29
Homélie - Dimanche de Pâques 2021

Célébration du Dimanche de Pâques 2021

Le disciple vit et il crut…

Homélie
(Ac 10,34a.37-43 ; Ps 117 ; Col 3,1-4 ; Jn 20,1-9 ; Lc 24,13-35)

Nous venons d’entendre le récit de l’événement le plus important de toute l’histoire de l’humanité, un récit très simple. On n’y raconte pas l’événement même de la résurrection de Jésus, cela n’est pas possible, aucun des évangélistes n’a tenté de le faire. On n’y voit même rien de surnaturel, pas de présence d’anges et Jésus n’y apparaît pas. Ça se termine par ces mots très simples : L’autre disciple vit et il crut. Qu’est-ce qu’il a vu cet autre disciple : Les linges, posés à plat, ainsi que le suaire qui avait entouré la tête de Jésus.

 

Il est évident, selon ce récit de saint Jean, que la foi en la résurrection n’est pas le fruit de l’imagination des disciples. Marie-Madeleine, la première à voir le tombeau vide, n’en conclut pas du tout que Jésus est ressuscité. Cela ne lui vient même pas à l’esprit. Elle part à la course pour aller prévenir Simon-Pierre et l’autre disciple ; elle leur dit, toute énervée : On a enlevé le Seigneur de son tombeau et nous ne savons pas où on l’a mis. Elle était loin de penser à une résurrection. Voyant lui aussi que le tombeau est vide, Pierre, tout comme Marie-Madeleine, n’en tire pas la conclusion que Jésus est ressuscité. Mais Jean, lui, il voit et il croit. On peut se demander ce qu’il voit que Marie-Madeleine et Pierre n’ont pas vu. C’est que Jean est capable d’interpréter ce qui se passe, d’en comprendre le sens. Ce récit n’a pas été écrit uniquement pour dire ce qui s’est passé au matin de Pâques. Il et porteur d’un message important pour tous ceux et celles qui le liront ou l’entendront proclamer au cours des siècles.

 

Ce récit veut nous dire que pour vraiment saisir la Bonne Nouvelle de Pâques, pour voir et comprendre cet événement, il faut les yeux du cœur. Ce n’est pas pour rien que le récit précise que l’autre disciple, celui qui accompagne Pierre, c’est celui que Jésus aimait.  N’est-ce pas à cause de cette grande amitié qui unissait Jésus et Jean, que ce dernier est toujours le premier à reconnaître le Seigneur ?  Dans le récit de l’apparition de Jésus sur le bord du lac de Galilée, il sera encore dit que c’est le disciple que Jésus aimait qui reconnaît Jésus avant Pierre. Jean semble avoir été étonné par la disposition des linges dans le tombeau, linges qui étaient bien disposés, sans désordre. Il lui est apparu clair, en remarquant ce détail, que le corps de Jésus n’avait pas été enlevé comme l’avait supposé Marie-Madeleine. Des voleurs ne prennent jamais le temps de tout ranger. Il semble que ce soit ce signe-là qui ait fait naître la foi de Jean en la résurrection. Son esprit s’illumine, il se rappelle toute la vie de Jésus, sa prédication, ses guérisons, ses rappels des Écritures. C’est de vie, de salut que Jésus a parlé. Le tombeau vide est la preuve que la mort ne peut plus contenir Jésus, qu’il est ailleurs. Non seulement il échappe au tombeau et à la mort, mais il est vivant. Il vit, et il crut.

 

On peut se demander comment il se fait que Pierre n’a pas saisi cela. Il faut vraiment dépasser le simple fait de voir, pour croire. Nous avons tous déjà fait cette expérience, un jour ou l’autre, d’avoir voulu adresser à une personne un signe qui lui disait notre amour, notre amitié, notre joie de nous retrouver avec elle, mais de constater avec tristesse que notre geste, nos paroles ont été mal interprétés. Ou encore, nous avons vécu cette peine de ne pas avoir saisi un signe que quelqu’un nous avait fait et qui aurait dû nous réjouir. Il faut beaucoup d’amour, beaucoup d’amitié entre deux personnes pour que tous les messages échangés soient parfaitement compris. N’est-il pas normal alors que le tombeau vide et les linges bien rangés n’aient dit leur signification qu’à celui qui était aimé et qui aimait davantage. Pour croire, il faut voir, se laisser déranger par des paroles, des faits qui viennent secouer notre compréhension trop sûre de la réalité. Mais il faut quelque chose de plus, quelque chose qui vient éclairer tout ce qui est vécu et en dévoile toute la signification.

 

Jean ne comprend pleinement qu’au moment où il accepte de se laisser conduire par l’Esprit Saint, qui est à la source des Écritures. En réfléchissant à ce qui se passe de si étonnant, en laissant son coeur accueillir l’événement extraordinaire qu’il est en train de vivre, Jean voit remonter à sa mémoire toutes ces paroles des Écritures que Jésus avait dites quand il annonçait sa résurrection. C’est parce qu’il accueille déjà la lumière de la Pentecôte que son coeur devient tout plein de joie et capable d’accueillir la lumière de Pâques, de croire en Jésus ressuscité et vivant avant même de l’avoir rencontré. C’est alors qu’il est vraiment devenu disciple et apôtre, dans le sens le plus fort de ces mots. Jusque-là, en effet, les disciples n’avaient pas vu que d’après l’Écriture, il fallait que Jésus ressuscite d’entre les morts. Cela va marquer la vie des apôtres et des disciples à jamais, cela va devenir l’essentiel de leur témoignage en paroles et en actes. Ce sera ce que dira l’apôtre Pierre quand il prendra la parole à Jérusalem, au sortir du Cénacle : Cet homme qui est mort sur la croix, il est ressuscité. … Ce Jésus, Dieu l’a ressuscité, nous en sommes témoins.

 

Aujourd’hui aussi, il faut dire que la croix n’est pas le dernier mot de la vie. Dans un monde où il y a tellement de souffrance, à des personnes qui sont aux prises avec tellement de difficultés, face à un avenir qui paraît si sombre pour un grand nombre de gens, il n’est pas facile de parler de résurrection, de vie dans la lumière et la joie, de chanter Alléluia. On a pris l’habitude depuis le Concile d’ajouter une 15e station au chemin de la croix traditionnel et elle nous rappelle cette bonne nouvelle que Jésus de Nazareth, le Crucifié, est ressuscité, est vivant. L’annonce de la Résurrection s’impose pour dire toute la Bonne Nouvelle. C’est une affirmation forte de notre foi que la souffrance et la mort de Jésus n’ont pas été la fin de tout.  Disciples du Ressuscité, il nous faut avoir l’audace des apôtres pour susciter dans nos milieux cette espérance qui naît de la foi en la résurrection.

Marc Bouchard, prêtre

Mbouchard751@gmail.com