Homélie "5e dimanche C" 10 février 2019

Homélie
2019/02/05
Homélie "5e dimanche C" 10 février 2019

5e dimanche C
10 février 2019
Homélie
(Is 6,1-8 ; I Cor 15,1-11 ; Lc 5,1-11)

Avance au large, sois missionnaire !

Jésus monta dans une des barques…  Il n’y a pas si longtemps, on a retrouvé au bord du lac de Galilée, enfouie dans la vase, une barque qui date de l’époque de Jésus ; on a réussi à la récupérer en la gardant passablement intacte. On peut la voir, dans un musée, quand on va en pèlerinage en Terre Sainte. Une découverte intéressante, surtout si on la met en lien avec le récit que nous venons de lire. Cette barque, toutefois, dont nous parle ce récit de l’Évangile n’était pas n’importe quelle barque. Alors qu’habituellement elle servait à des pêcheurs pour aller prendre du poisson, voilà qu’elle est utilisée par Jésus comme tribune, pour parler, pour proclamer la Parole de Dieu.

Servons-nous de notre imagination pour recréer cette scène en prêtant attention à ce qui peut sembler n’être que des détails. Jésus monta dans une des barques qui appartenait à Simon, et lui demanda de s’éloigner un peu du rivage. Puis il s’assit et, de la barque, il enseignait la foule. Les gens, assis sur le rivage, écoutaient la Parole de Dieu, ce sont les mots du récit : la foule se pressait pour écouter la Parole de Dieu. L’écrivain sacré poursuit en nous racontant un événement qui a grandement surpris les apôtres et qui nous étonne nous aussi. Quand il eut fini de parler, Jésus dit à Simon : Avance au large, et jetez vos filets pour la pêche.

Simon et les autres ne le savent pas, mais en faisant ce que Jésus leur demande, et non sans hésitation, ils se lancent dans l’aventure d’une toute autre pêche, elle aussi miraculeuse : une autre pêche qui va transformer leur vie et changer l’histoire de l’humanité. Sois sans crainte, désormais, ce sont des hommes que tu prendras ! Devenus pêcheurs d’hommes, Simon-Pierre et ses compagnons ne feront-il que des pêches miraculeuses ? De fait, après les événements de la Résurrection et de la Pentecôte, la Parole sera proclamée sur la place publique de Jérusalem, et de là la Bonne Nouvelle se répandra dans tout l’Empire romain, comme nous le racontent les Actes des Apôtres.

Cette pêche sur le lac de Galilée a été pour Pierre et les autres apôtres un signe fort, un appel à la foi, une foi qui les fera s’engager à suivre Jésus, et comme lui à se mettre au service de la Parole, jusqu’au don de leur vie.  Il va en être de même pour tellement d’autres disciples de Jésus à travers les siècles. Le pape François, comme l’a fait le pape Jean-Paul II, veut nous rappeler cela en canonisant un si grand nombre de femmes et d’hommes de tous âges, qui ont marqué non seulement l’histoire de l’Église, mais aussi l’histoire de l’humanité. Pensons à François de Laval, Marie de l’Incarnation, Mère Térésa, Oscar Romero, aux martyrs d’Algérie et à tant d’autres.

La pêche miraculeuse ! Il ne faudra pas beaucoup de temps pour que viennent les oppositions et même les persécutions. L’histoire de l’annonce de l’Évangile au monde n’a pas comporté que des périodes glorieuses. Dans ce temps de l’histoire qui est le nôtre, les pêches miraculeuses semblent bien se faire plutôt rares, du moins en Occident. Les Évangiles nous racontent que tout n’a pas été facile pour Jésus et il a prévenu ses disciples qu’il en serait de même pour eux aussi. Si l’on m’a persécuté, on vous persécutera vous aussi. Il les a toutefois encouragés : Si on a gardé ma parole, on gardera aussi la vôtre.

L’Église est en croissance dans de nombreuses régions du monde, particulièrement en Afrique, et en même temps elle connaît la persécution en beaucoup d’autres. En Occident, nous connaissons présentement plutôt le temps de la semence, du recommencement, de la patience, de l’espérance. On pourrait penser que le pape François a été désigné, donné à l’Église par l’Esprit Saint justement pour nous rappeler cela et nous inviter à nous faire missionnaires, même si ce n’est pas facile. 

Laissons-nous interpeller par la symbolique de la pêche ! Il se peut que cela ne plaise pas, car ça semble considérer les humains comme des poissons que l’on capture. Toute symbolique a ses limites, et il faut la resituer dans la tradition biblique, celle de la pêche dont il est question en ce dimanche. La mer était alors vue comme un milieu dangereux, et avec raison ; alors, sortir des gens de la mer, c’était leur donner la vie, la liberté, l’espérance.

La mission de l’Église n’est pas de tromper les gens d’aujourd’hui, de les attraper dans quelque filet que ce soit. La mission de l’Église consiste plutôt et uniquement à faire entendre au monde un Évangile, une Bonne Nouvelle, une Parole de salut. Pierre, André, Jacques, Jean et les autres ont fait leur travail. Après eux, il est tellement grand le nombre d’hommes et de femmes qui ont poursuivi leur mission.

Aujourd’hui, Jésus compte sur nous pour que cela continue. Le pape François nous donne l’exemple : tout récemment, il est allé à Panama pour la Journée mondiale de al Jeunesse, de là il s’est rendu à Abu Dhabi dans les Émirats Arabes Unis pour une rencontre interreligieuses et il se rendra bientôt au Maroc.

La première lecture a été choisie en lien avec ce récit évangélique. Elle nous raconte la vocation toute particulière du prophète Isaïe. Choisi par Dieu, malgré ses limites humaines, même malgré ses péchés, il reçoit la mission de parler au nom de Dieu. Sa mission ne sera pas facile, il le sait bien, mais cela ne l’empêche pas de dire au Seigneur : Je serai ton messager, envoie-moi. Dans la deuxième lecture, saint Paul nous disait la même chose : Je ne suis pas digne d’être appelé Apôtre, puisque j’ai persécuté l’Église de Dieu. Mais ce que je suis, je le suis par la grâce de Dieu, et sa grâce, venant en moi, n’a pas été stérile. Écoutons bien les mots qui suivent : Qu’il s’agisse de moi ou des autres, voilà ce que nous proclamons, voilà ce que vous croyez.

La tradition chrétienne a toujours vu l’Église comme étant cette barque de Pierre, d’où la Bonne Nouvelle de Jésus n’a pas cessé, ne cesse pas d’être annoncée. Les autres dont parlait saint Paul, aujourd’hui c’est nous. L’Église est ce lieu où Jésus continue de parler à ses disciples et par eux de parler au monde. Réunis ici dans cette église, pour le rencontrer, le Ressuscité nous fait entendre sa Parole, la Parole de salut. Il compte sur nous pour que nous soyons non seulement les auditeurs mais aussi les proclamateurs de cette Parole. Rendons grâce au Seigneur Jésus d’être de ceux et celles auxquels il dit, comme à Simon et à ses compagnons: Soyez sans crainte, je suis avec vous.

Prière

Dieu notre Père, au bord du lac de nos travaux et de nos peines, ton Fils est toujours là, nous faisant entendre ta Parole, rompant et partageant le pain. Sa présence avec nous nous rend capables de réaliser ce qui nous paraît difficile sinon impossible. Augmente en nous la foi, fais que nous sachions le reconnaître quand il vient à notre rencontre et fais, qu’en étant fidèles à sa Parole, nous poursuivions notre route de missionnaires, dans la sérénité et le partage. Amen.

Marc Bouchard, prêtre