Homélie - 4e dimanche du Carême A 2020

Homélie
2020/03/19
Homélie - 4e dimanche du Carême A 2020

4e dimanche du Carême (Année A 2020)

"C'est toi qui es son disciple"

Homélie
(1 Sam 16,1b.6-7.10-13a ; Ps 22 ; Eph 5,8-14 ; Jn 9,1-41)

Les choix de Dieu ! Cela nous interroge toujours ! Dimanche dernier, nous avons lu ce récit de la rencontre de Jésus avec la Samaritaine, une femme inconnue, d’une autre religion, dont la vie était loin d’être exemplaire, pourtant c’est elle que Jésus a choisi pour se faire connaître aux gens de sa ville. Les deux récits que nous venons d’entendre, et même le passage de la lettre aux Éphésiens, nous mettent aussi devant ce mystère des choix de Dieu. Pourquoi ce choix du jeune David, le septième et le dernier gars de la famille, et on va le chercher dans les champs, où il gardait le troupeau de son père ? Pourquoi Paul a-t-il été choisi par le Seigneur, lui qui persécutait les chrétiens ? Il deviendra un des piliers sur lesquels se construira l’Église du Christ. Le mystère des choix de Dieu !

 

Il semble bien que les disciples de Jésus se posaient les mêmes questions que nous. C’est ce que dit saint Jean : En sortant du temple, Jésus vit sur son passage un aveugle de naissance. Ses disciples l’interrogèrent : Rabbi, pourquoi cet homme est-il aveugle ? Est-ce lui qui a péché, ou bien ses parents ? Jésus répondit : Ni lui, ni ses parents. Mais l’action de Dieu devait se manifester en lui. Le mystère de la grâce de Dieu, le mystère du plan de Dieu sur le monde, sur l’humanité, sur chacun, sur chacune de nous. L’action de Dieu devait se manifester en lui, un aveugle de naissance. Comme pour le roi David, comme pour la femme de Samarie, comme pour l’apôtre Paul.

 

Voilà que la rencontre de Jésus, tout à fait imprévue, libère cet aveugle des ténèbres dans lesquelles il était enfermé, vient complètement changer sa vie. Le récit montre bien que ce n’est pas lui qui demande d’être guéri : c’est Jésus qui vient vers lui, qui prend l’initiative. Par ce miracle Jésus veut faire comprendre à ses disciples que sa mission consiste à ouvrir les yeux, pour que ceux et celles qui lui font confiance puissent voir et comprendre tout ce qui les entoure, et surtout devenir capables de voir les merveilles de l’action de Dieu dans leur vie, dans l’Église, dans le monde. Je suis venu en ce monde, dit Jésus, pour rendre un jugement : que ceux qui ne voient pas puissent voir, et que ceux qui voient deviennent aveugles. Une parole étonnante !

Regardons bien le geste de Jésus quand il s’approche de l’aveugle. Il refait le geste créateur de Dieu, comme il est raconté dans le livre de la Genèse : Il fit de la boue qu’il appliqua sur les yeux de l’aveugle. Il fait naître un homme nouveau. C’est une nouvelle naissance que ce récit nous raconte, c’est vraiment une vie toute autre qui s’ouvre devant cet homme, tout émerveillé devant ce monde de lumière et de couleurs qu’il découvre. Ce geste de Jésus ne fait-il pas penser à un geste sacramentel. Cet aveugle-né renaît, passe à une vie nouvelle, et dans son corps, et dans son cœur. Il vivait et marchait dans les ténèbres, voilà que sa vie est remplie de lumière : il peut vivre comme tout le monde et en plus il va pouvoir marcher à la suite de Jésus.

 

Il faut remarquer que dans ce récit Jésus n’est présent qu’au début et à la fin. La partie centrale est comme un procès qu’on fait à Jésus, mais il n’est pas là. C’est l’aveugle guéri qui est appelé à témoigner à sa place, c’est lui qui par étapes fait savoir qui est Jésus. Cet homme découvre peu à peu qui est celui qui l’a guéri et va jusqu’à se faire son défenseur. La discussion avec les pharisiens le fait devenir peu à peu disciple de Jésus. Ce mendiant qui était aveugle, laissant la grâce agir en lui, devient capable de faire connaître Jésus. Quand Jésus revient vers lui, c’est pour lui faire prendre conscience qu’il vient de vivre une autre naissance, qu’il est entré dans un monde de lumière, dans le monde de la foi. Crois-tu au Fils de l’homme, lui dit Jésus. Il répond : Qui est-il, Seigneur, pour que je croie en lui ? Jésus lui dit : Tu le vois, c’est lui qui te parle. Il dit : Je crois, Seigneur, et il se prosterna devant lui. Il se prosterna, ne peut-on pas voir là un geste cultuel.    

 

L’évangéliste, dans son récit, insiste pour faire comprendre à ses lecteurs, pour nous faire comprendre qu’il y a deux sortes d’aveuglement : il y a la cécité naturelle qui était la situation de cet homme depuis sa naissance, et puis, ce qui est beaucoup plus grave, il y a l’aveuglement du cœur. Lors de sa première rencontre avec l’aveugle, Jésus a fait le geste qui lui a rendu la vue. Lors de sa deuxième rencontre, c’est son cœur qu’il a ouvert à une autre lumière, la vraie lumière. Il y a un autre détail important dans ce récit, quelque chose qui nous concerne. Il faut bien saisir que ce n’est pas l’aveugle guéri qui se dit disciple de Jésus, ce sont les autres, les pharisiens, qui l’affirment. Toi, que dis-tu de lui, puisqu’il t’a ouvert les yeux ? Il dit : C’est un prophète. … Ils se mirent à l’injurier, en lui disant : C’est toi qui es son disciple.     

 

La question qui nous est posée par la Parole de Dieu de ce dimanche est celle-ci : Est-ce que dans nos milieux on nous reconnaît comme étant des baptisés, des chrétiennes, des chrétiens ? Est-ce que ça se voit que nous sommes disciples de Jésus, à certains de nos comportements, à certaines de nos paroles, à des gestes concrets que nous posons ? Est-ce que nous acceptons facilement, sans gêne, de manifester notre foi en Jésus ? Au risque de nous faire poser des questions, d’avoir à supporter la moquerie, de voir des gens s’éloigner de nous, peut-être même de nous faire injurier ?

 

En la nuit de Pâques, nous aurons à rechoisir notre baptême. Le ferons-nous en toute vérité, après avoir vécu le carême comme un temps de vérification de notre foi dans le Christ-Jésus ? Est-ce que la Parole de Dieu qui nous est dite au cours de ce carême, principalement chaque dimanche, vient raffermir notre foi en Jésus ?

 

Marc Bouchard, prêtre

 

mbouchard751@gmail.com