Homélie - 2e dimanche de Pâques 2021 B

Homélie
2021/04/06
Homélie - 2e dimanche de Pâques 2021 B

Célébration du 2e dimanche de Pâques 2021

Homélie

(Ac 4,32-35 ; 1 Jn 5,1-6 ; Jn 20,19-31)

L'apôtre Thomas n’aurait jamais pensé devenir un personnage aussi célèbre. Son nom est entré dans le langage populaire, même chez les non-croyants, à cause de sa naïveté et de son hésitation à comprendre ce qui se passait. Il ne serait jamais venu à l’idée de l’Évangéliste que son récit prendrait cette signification, que Thomas deviendrait ainsi le type de la personne qui hésite à croire ce qu'on lui dit.

Comprendre ainsi ce texte est d'ailleurs tout à fait contraire à ce que son auteur a voulu dire à ses lecteurs, de son temps et de maintenant. Ce récit a plutôt pour but de présenter Thomas comme un modèle pour les croyants et croyantes qui viendraient après lui. À l'encontre de bien des peintres et dessinateurs d'images, il faudrait voir Thomas, non pas du tout en train de toucher de ses doigts les plaies de Jésus, mais plutôt, bouleversé par la vue du Ressuscité et ému par les paroles qu’il lui dit. Il faudrait plutôt le voir se jeter à genoux devant Jésus et avoir à son égard cette étonnante confession de foi : Mon Seigneur et mon Dieu !

L’Évangéliste avait déjà parlé à deux reprises de Thomas. Une première fois, lors de la mort de Lazare, pour souligner son enthousiasme, pas toujours réfléchi. Il s'était empressé de dire aux autres disciples : Allons, nous aussi, et nous mourrons avec lui.

Une autre fois pour montrer qu'il était un homme qui ne saisissait pas vite. Au cours de la dernière cène, lorsque Jésus avait dit aux apôtres qu'il allait les quitter et qu'ils savaient quel chemin prendre pour aller le retrouver, Thomas avait eu cette réaction : Seigneur, nous ne savons pas où tu vas. Comment pourrions-nous savoir le chemin ?

Il faut nous rappeler que devant l'annonce de la résurrection de Jésus, Thomas a une réaction qui ressemble beaucoup à celle des autres apôtres et disciples lors des apparitions du Ressuscité. Les récits évangéliques nous les font voir hésitants à croire eux aussi. Thomas réagit tout simplement d'une façon toute personnelle, selon son tempérament. Engagé à la suite du Seigneur, il ne parvient pas à se libérer de tous ses doutes. Thomas ressemble peut-être aussi à plusieurs d'entre nous. Ne nous rappelle-t-il pas nos propres hésitations à croire, qui ne réussissent pas à nous éloigner de Jésus. 

Thomas ne se situerait-il pas à ce moment où il a fallu que les apôtres, les disciples quittent la foi des apparitions pour entrer dans la foi de l'Église, qui se vit en l'absence du Ressuscité, la foi vécue sans qu'on voit, touche, entende le Ressuscité. N’est-ce pas intéressant pour nous de lire ainsi ce récit dont l’auteur en était sûrement arrivé lui aussi à cette étape de sa vie de croyant ? Pourquoi alors ne pas voir en Thomas, non pas quelqu'un qui est hésitant à croire, mais plutôt le dernier à croire en présence du Ressuscité et le premier à n'avoir plus besoin de le voir et de le toucher pour s'écrier : Mon Seigneur et mon Dieu !

Peut-être devons-nous remercier Thomas. Il ose poser les questions que nous gardons dans le secret de notre coeur et son audace nous vaut cette belle réponse de Jésus, cette réponse qu’il nous fait tellement plaisir d’entendre : Heureux ceux et celles qui croient sans avoir vu. Cette béatitude dite par Jésus, à la fin de cette dernière rencontre avec ses disciples, ne comporte aucun reproche à l'égard de Thomas. Elle concerne tous les disciples, tous ceux et celles qui viendront après ceux et celles qui ont vécu avec Jésus. Et nous sommes de ceux-là, de celles-là !

Jésus nous dit ce matin que si nous n'avons pas pu le voir, le toucher, l'entendre, nous ne sommes pas pour autant moins heureux que Thomas et tous les autres. Notre situation n'est pas tellement différente de la leur. Eux aussi, même s'ils ont vu Jésus, ont dû s'engager personnellement dans la foi après l’Ascension. Il nous faut remarquer que saint Jean termine son Évangile, le dernier des quatre évangiles, en s’adressant à ses lecteurs, à nous. D’abord par cette parole de Jésus, cette béatitude que nous accueillons avec joie en ce temps pascal : Heureux ceux et celles qui croient sans avoir vu. Et aussi par ces autres paroles de l’Évangéliste, les dernières : Cela vous est dit pour que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et pour qu’en croyant, vous ayez la vie en son nom.

Saint Jean ne parle pas de la vie au-delà de la mort, de la vie éternelle, cela a déjà été annoncé, et tout au long de son Évangile. Il parle alors de la vie maintenant, à partir du moment où dans la foi on croit que Jésus est ressuscité et vivant. Le dernier des évangiles se termine en racontant comment la foi en la résurrection a profondément marqué, transformé la vie de celles et ceux qui en sont devenus des témoins. Les évangiles nous racontent comment la foi a libéré Marie-Madeleine de sa tristesse, de sa désolation, comment elle a rempli de joie les disciples que la peur avait enfermés derrière des portes verrouillées, comment elle a dégagé Thomas de son incrédulité !

La foi en Jésus, ressuscité et vivant change celles et ceux qui l’accueillent, elle fait découvrir le vrai sens de la vie, qu’elle vaut la peine d’être vécue. Voir sa vie transformée, et dès maintenant, ne serait-ce pas cela bénéficier ce cette vie à laquelle ouvre la foi ? L’existence, notre vie de chaque jour, de chaque semaine reste la même avec ses moments de réussite et de joie, et aussi avec ses problèmes et ses moments difficiles, nous en savons quelque chose présentement. La foi qui nous habite, nous guide se montre capable d’y mettre de la lumière et de l’espérance. Jésus vint et il était là au milieu d’eux. Les disciples furent remplis de joie en voyant le Seigneur. … Je vous verrai de nouveau et votre cœur se réjouira, et votre joie, personne ne vous l’enlèvera. 

Marc Bouchard, prêtre

Mbouchard751@gmail.com