UNE ÉGLISE QUI N’EST PAS HABITÉE PAR LA JOIE DE L’ÉVANGILE N’EST PAS CONTAGIEUSE (Pape François) Colloque pour le 100e anniversaire de la Société des Missions-Étrangères du Québec

Événement
2021/10/19
UNE ÉGLISE QUI N’EST PAS HABITÉE PAR LA JOIE DE L’ÉVANGILE N’EST PAS CONTAGIEUSE (Pape François)  Colloque pour le 100e anniversaire de la Société des Missions-Étrangères du Québec

Un colloque des plus intéressants pour souligner le 100e anniversaire de la fondation de la Société des Missions-Étrangères du Québec s’est tenu à Salle des Promotions du Séminaire de Québec les 18 et 19 octobre 2021. Dû à l’initiative de l’abbé Gilles Routhier, supérieur général du Séminaire de Québec, et à celle de l’abbé Bertrand Roy, membre de la Société des Missions-Étrangères, ce colloque sous le thème « Des Missions Étrangères à la Mission au Québec », était organisé par la Société des Missions-Étrangères de Québec, la Faculté de Théologie et de sciences religieuses et le Séminaire de Québec en partenariat avec l’Assemblée des évêques catholiques du Québec et les Œuvres pontificales missionnaires.

Tout en respectant les mesures sanitaires en vigueur, plus de quatre-vingt-dix personnes se retrouvaient dans la Salle des promotions du Séminaire de Québec pour suivre un programme d’interventions, de conférences et d’ateliers très bien organisé. Chaque demi-journée était consacrée à un thème particulier : l’urgence missionnaire au Québec, une théologie de la mission pour le Québec, des orientations et des stratégies missionnaires pour notre temps et la formation des missionnaires. Le déroulement de chaque demi-journée était structuré de la manière suivante : une intervention principale, un buzz sur place suivi d’une prise de parole de deux répondants et d’un travail en ateliers. Ce format a été très apprécié des participantes et participants.

Et voici une vue rapide du contenu des interventions.

Sur la question de l’urgence missionnaire au Québec les deux intervenants, l’abbé Gilles Routhier et l’abbé Bertrand Roy n’ont escamoté aucune question. Pour monsieur Routhier, l’urgence se définit habituellement à partir d’une menace, mais au point de départ de la prise de conscience de l’urgence missionnaire au Québec, on doit plutôt mettre la gratuité de l’Amour de Dieu. Le conférencier de commenter son affirmation à partir la scène de la Visitation de Marie à sa cousine Elisabeth. Là où l’expérience spirituelle n’est plus présente, constate-t-il, l’urgence missionnaire ne se fait pas sentir. L’abbé Bertrand Roy quant à lui a relu l’histoire centenaire de la Société des Mission-Étrangères à partir de la conscience de l’urgence missionnaire éprouvée au cours de ce siècle. Cette histoire peut se répartir en trois phases : fondation, expansion et exploration. Un petit fil conducteur retient son attention dans ces trois phases, c’est le souci des personnes exclues. Dans le début elle était attentive à l’exclusion du salut et entraînait les missionnaires vers la Chine, puis par la suite s’est développé une prise de conscience progressive qui a amené les membres de la Société à se consacrer de plus en plus à la présence auprès des personnes délaissées ou exclues de la société.

En après-midi, lundi le 18 octobre, un conférencier de feu a su retenir l’attention de l’auditoire avec une intervention musclée et soignée. Il s’agit de Mgr Alain Faubert, évêque auxiliaire à Montréal. Avec toute la fougue qu’on lui connaît, il commence par rappeler le mot du pape François qui invite à se méfier des succès qui ne passent pas par la Croix. Dans le sillage de cette constatation, il insiste pour montrer que la mission au Québec doit mettre le focus à la bonne place et se brancher sur le Règne de Dieu qui en est l’objectif. La finalité de l’activité missionnaire ne peut être que la vie, la joie et le bonheur des personnes. C’est le Règne de Dieu parmi nous. Et il précise alors le rôle de l’Esprit Saint : Esprit conducteur, Esprit décodeur, Esprit déclencheur, car, conclut-il, l’Esprit Saint nous précède. L’une des personnes répondantes, Mgr Pierre Murray, secrétaire de l’Assemblée des évêques catholiques du Québec, surprend l’assemblée en proposant de faire un virage dans la catéchèse des enfants au profit de l’action au service de Royaume. Il propose ainsi de se décentrer de l’enfance et de la jeunesse pour aller vers les adultes car aujourd’hui dans notre monde il faut être adulte pour choisir d’être chrétien et il ne faut pas être surpris de rencontrer la croix.

Le mardi 19 octobre 2021, le programme nous a amené sur le terrain des orientations et des stratégies pour être missionnaire aujourd’hui et sur celui de la formation missionnaire.

En avant-midi, le premier intervenant fut Mgr Pierre Goudreault, évêque de Ste-Anne de la Pocatière. Avec brio et selon un plan digne d’un professeur d’université – ce qu’il fut – il a dans l’esprit des conférences de la journée de lundi dégagé, selon lui, la ligne des orientations et de stratégies qui doit présider à la mission aujourd’hui. Il serait trop long de reprendre ici son enseignement au complet. Mgr Goudreault a développé quelques repères pour nous guider. En premier lieu, il a souligné l’importance de connaître le Québec où nous vivons, un Québec moderne et sécularisé où l’Église a perdu sa visibilité mais où il reste un fonds chrétien. En second lieu, il a développé les stratégies missionnaires en mettant l’accent sur nos pauvretés comme Église, mais en insistant sur le fait que la mission ne relève pas d’abord de notre entreprise mais de Dieu et de citer Hans Jonas qui écrit : « La foi chrétienne n’a pas dit son dernier mot et demeure toujours une option durable. » En troisième lieu, il a caractérisé les missionnaires pour notre temps comme des disciples-missionnaires envoyés par leur communauté de foi.

En après-midi, la dernière intervenante était Sœur Évangéline Plamondon des Sœurs de l’Immaculée Conception dont la fondatrice Délia Tétrault fut très proche du groupe des fondateurs de la Société des Missions-Étrangères. Sœur Évangéline nous a fait part avec toute son expérience missionnaire non pas de trucs mais des attitudes à promouvoir chez les formateurs et formatrices dont la foi profonde est essentielle. Elle a ensuite commenté l’expression « apprenti-missionnaire » en faisant ressortir que la vie en Église s’apprend, que l’apprenti sait creuser ses motivations, qu’il travaille en solidarité, qu’il demeure toujours en service et qu’il ne met pas de frontières à son action. Pour terminer, elle visitait avec nous les lieux de formation qui sont au cœur du monde qu’on a parfois peur de fréquenter. « Impossible de nous taire sur ce que nous avons vu et entendu » a-t-elle répété en citant le pape François.

Notons en terminant que la Société des Missions-Étrangères (SMÉ) a été fondée en 1921 par l’Assemblée des évêques du Québec qui existait déjà à cette époque. Durant le colloque on a pu noter qu’elle reprend le sigle SME que le Séminaire de Québec utilise toujours puisque qu’au point de départ Mgr de Laval l’avait nommé le « Séminaire des Missions-Étrangères ». C’est dire la proximité de ces deux institutions.

 Crédits photo H. Giguère

Monsieur le Supérieur général, l’abbé Gilles Routhier (dont on voit la photo ci-contre) nous livre maintenant quelques-unes de ses impressions générales sur ce colloque dont il a été un artisan important. Deux « Séminaires des missions étrangères », celui de Québec et celui de Pont-Viau, avaient conjugués leur force pour tenir ce colloque dont le thème « Des missions étrangères à la mission au Québec » indique le déplacement intervenu au cours du dernier siècle. L’on peut dire, aujourd’hui, « Québec terre de mission », alors qu’en 1921, les territoires de mission étaient situés dans les pays lointains. Mais le déplacement ne s’arrête pas là. D’une société cléricale, la Société des missions étrangères compte aujourd’hui plusieurs laïcs, hommes et femmes, associés. Depuis 1978, elle a envoyé en mission 130 laïques-missionnaires originaires d’une quinzaine de pays. C’est dire également qu’elle s’est internationalisée. Du reste, les participants au colloque étaient originaires d’une douzaine de pays, nous donnant le portrait de ce que devient l’Église du Québec.

Il y a cent ans, les évêques du Québec, conscients de l’urgence missionnaire à leur époque, mettait sur pied une société missionnaire appelée à œuvrer dans les missions étrangères. Mis devant une nouvelle urgence missionnaire, au Québec cette fois, nous sommes placés devant des choix ambitieux et audacieux à faire. Créer le véhicule adéquat pour une relance de la mission au Québec. Aurons-nous l’audace et l’ambition nécessaire pour répondre à cet appel ? 

L'affiche du centenaire de la Société des Missions-Étrangeres du Québec (Crédits photo H. Giguère)