Homélie pour la messe du jour de Noël par M. l'abbé Marc Bouchard

Homélie
2016/01/08
Homélie pour la messe du jour de Noël par M. l'abbé Marc Bouchard

Homélie

Pour la messe du jour de Noël

(Is 52,7-10 ; Hb 1,1-6 : Jn 1,1-18)

Il est grand le mystère de la  foi ! … Nous disons, nous chantons cette acclamation à chaque Eucharistie, aussitôt après les paroles de la consécration, alors que le pain et le vin sont devenus le Corps et le Sang du Christ. Hier soir, pour la messe de la nuit de Noël, la liturgie faisait lire ce récit bien connu, rédigé par saint Luc, qui nous raconte la naissance de Jésus à Bethléem. À la fin de ce récit évangélique, tout plein de la joie de Noël, nous aurions pu dire aussi : Il est grand ce mystère de la foi, ce mystère de la venue dans notre monde du Fils de Dieu.

Ce matin, la liturgie nous parle aussi de la venue de Dieu dans notre monde, de la naissance de Jésus, mais en nous faisant relire le début de l’Évangile de saint Jean. Dans un tout autre langage que celui de saint Luc, il nous dit le même mystère de notre foi. Là encore, nous aurions pu dire comme acclamation : Il est grand le mystère de la foi !

Au commencement, écrit saint Jean, était le Verbe, la Parole de Dieu, et le Verbe était auprès de Dieu, et le Verbe était Dieu. … Par lui, tout s’est fait et rien de ce qui s’est fait ne s’est fait sans lui. … En lui était la vie, et la vie était la lumière du monde. … Et le Verbe s’est fait chair ; il a habité parmi nous. On n’a pas là vraiment un récit, mais c’est le même mystère qui est annoncé : Le Verbe s’est fait chair, il a habité parmi nous. Le même mystère de notre foi est dit dans ces deux textes évangéliques, même s’ils sont très différents, et les deux nous invitent à dire, à chanter : Il est grand le mystère de la foi !

Celui dont nous rappelons aujourd’hui la venue dans notre monde, c’est le Verbe de Dieu, la Parole de Dieu, la Parole créatrice de Dieu, la Parole qui a créé le monde et y a fait surgir la vie. Souvenons-nous du récit de la création dans le livre de la Genèse : Dieu dit que la lumière soit et la lumière fut… Dieu dit que la terre produise l’herbe, et la plante et l’arbre, et ce fut ainsi. Le récit se poursuit avec le même langage jusqu’à la création de l’homme et de la femme. Un beau poème pour évoquer  que le monde est issu de la puissance créatrice de Dieu, que la Parole de Dieu, le Verbe de Dieu a fait surgir le monde.

Dieu vit que cela était bon, répète  sept fois le texte de la Genèse. Mais Dieu ne va pas que regarder de loin ce monde qu’il a créé, se tenant  à l’écart, à l’extérieur de sa création. En Jésus, l’Enfant de la crèche, l’Éternel, le Tout-puissant est entré dans le temps, la Parole s’est faite chair, Dieu s’est fait homme. Ce jour-là, le jour de la naissance de l’Enfant à Bethléem, Dieu est vraiment devenu un homme. Il fait maintenant partie de notre histoire, il est désormais personnellement concerné par ce monde qu’il a créé, par cette humanité dont il s’est rendu solidaire.

Le monde est autre chose que son œuvre. Dieu n’est pas un artisan, un artiste qui contemple ce qu’il a fait. Il ne se contente pas de jeter un regard sur ce qui se passe dans le monde. Noël, cette fête d’aujourd’hui, vient nous redire de façon forte qu’il a voulu s’impliquer lui-même dans l’histoire de sa propre création, qu’il fait partie de la même histoire que nous, l’histoire de notre humanité. L’oraison de la messe d’avant-hier disait : Ton Fils a voulu prendre chair de la Vierge Marie, il s’est lié pour toujours à notre humanité. À Bethléem, en l’Enfant de la crèche, l’Éternel, le Tout-Puissant est devenu l’Emmanuel, Dieu-parmi-nous, Dieu-avec-nous.

Nous n’avons donc pas à chercher Dieu dans les profondeurs du ciel. Il s’est fait présent à notre monde. Il est venu vivre notre vie. Dimanche, fête de la Saine Famille, nous célébrerons sa vie dans sa famille à Nazareth, avec ses parents, Marie et Joseph, grandissant en grâce, en sagesse et en âge. Il a partagé le sort de toute personne humaine : il a lui aussi connu les exigences du travail, la faim, la fatigue, le rejet, la souffrance, la peur devant la mort, et une mort difficile.  

Que l’Éternel, le Dieu de toute puissance et de toute gloire ait voulu connaître les limites et les faiblesses de notre condition humaine, cela peut paraître invraisemblable. Nombreux sont ceux et celles qui n’acceptent pas d’y croire. Pour nous chrétiens, chrétiennes, c’est ce mystère que notre foi nous fait célébrer aujourd’hui, ce mystère qui dans les ténèbres de l’histoire du monde a fait briller la lumière, a fait que nos nuits deviennent de saintes nuits.  

En Jésus, en l’Enfant de la crèche, Dieu est venu dans notre monde et tout a changé. Ne compte-t-on pas les années en disant avant et après le Christ, avant et après l’évènement de Bethléem. Fêter Noël, c’est dire que la Parole créatrice de Dieu s’est faite chair et que cette Parole a dit pour nous ces mots qui sont lumière dans la vie du monde, dans notre vie : Dieu est amour, Dieu est notre Père, Dieu aime le monde, il nous aime.

C’est ce que l’Enfant de la crèche ne cessera pas de dire quand, devenu adulte, il parcourra les routes de la Palestine, il le dira particulièrement à ceux et celles qui ne se sentent pas aimés. C’est le message qu’il confiera à ses disciples en les envoyant parcourir les routes du monde. C’est aussi l’appel que nous fait, nous fera entendre cette année sainte, l’année de la miséricorde et que nous avons la mission de faire entendre.

Pour ceux et celles qui croient en ce mystère de Noël, pour nous qui le célébrons une deuxième fois ce matin dans cette Eucharistie toute pleine de joie, il n’est rien qui puisse éteindre la lumière éclatante qui a brillé dans le ciel de Bethléem cette nuit-là. L’extraordinaire, l’impensable s’est alors produit. L’extraordinaire, l’impensable est encore possible aujourd’hui, si nous nous laissons guider par cet homme Jésus, lumière pour notre monde, le Ressuscité, que nous sommes venus rencontrer dans cette Eucharistie.