Homélie de M. l'abbé Marc Bouchard en l'occasion du 3e dimanche de l'Avent 2015

Homélie
2015/12/14
Homélie de M. l'abbé Marc Bouchard en l'occasion du 3e dimanche de l'Avent 2015

3e dimanche de l’Avent 2015

Homélie

(Sop 3,14-18 ; Ph 4,4-7 ; Lc 3,10-18)

Soyez toujours dans la joie du Seigneur ; laissez-moi vous le redire : soyez dans la joie. Ce sont les mots de l’apôtre Paul proclamés dans la deuxième lecture. Réjouis-toi, tressaille d’allégresse, disait le prophète. Et le psaume faisait chanter : Laissons éclater notre joie : Dieu est au milieu de nous. Le dimanche de la joie !

Cette joie, elle est évidente en ce temps où nous sommes, tout proche de Noël ; elle éclate partout. Partout, il y a profusion de lumière, partout on fête. Mais, disciples du Seigneur, il nous faut entendre l'invitation de l'Évangile et ne pas nous en tenir à une joie qui risque fort de n'être que superficielle, parce que tout simplement liée à une atmosphère de fête. Il ne faut quand même pas que Noël ne soit que la célébration du solstice d’hiver et devienne ainsi une fête païenne. Notre tradition québécoise en a toujours fait une fête chrétienne.

Le récit de l’évangile de saint Luc est la continuation de celui de dimanche dernier. Nous entendions alors l’appel que Jean-Baptiste nous adressait : un appel à nous convertir. Voilà qu’aujourd’hui, il nous dit comment doit se vivre cette conversion. Rappelons-nous tout d’abord que se convertir, c’est avant tout changer de mentalité. Se convertir, c’est se retourner davantage vers Dieu ; c’est faire que Dieu soit, en vérité, encore plus présent au coeur de notre vie.

Ce que ce récit évangélique de saint Luc disait aux chrétiens de son temps et nous redit à nous aujourd’hui, c’est que la conversion, si elle est d’abord intérieure, elle ne peut pas être seulement intérieure. La conversion, le retournement du coeur doit se concrétiser en s’engageant dans une autre façon de vivre. Il faut bien remarquer que les gens qui viennent se faire baptiser par Jean-Baptiste lui demandent: Que devons-nous faire ? Quels sont les changements concrets qui vont manifester extérieurement la vérité de notre conversion ?

Les réponses de Jean Baptiste doivent attirer notre attention et à deux titres. Notons d’abord que ses réponses portent sur le comportement social des gens, sur leurs attitudes à l’égard des autres. Notons aussi que Jean-Baptiste ne parle ni d’expiation pour les péchés, ni de gestes de pénitence, ni même de prière. Il demande, à ceux qui l’interrogent, de venir en aide aux gens qui autour d’eux sont dans le besoin et aussi d’être honnêtes dans l’exercice de leur métier. Partage et honnêteté, attitudes essentielles à la conversion du coeur !

On parle actuellement beaucoup de changements climatiques et c’est pour nous dire que nous devrons changer nos manières de vivre. Si ce n’est pas nous, ce seront sûrement les prochaines générations, les enfants et les petits-enfants d’aujourd’hui qui devront modifier leurs façons de vivre. Il est évident qu’en ce domaine de notre vie une conversion sera nécessaire au cours des prochaines décennies. On s’inquiète devant ces foules de migrants que la télévision nous montre; il est certain aussi que ce mouvement-là va s’accentuer. Ce n’est sûrement pas de ce genre de conversion dont Jean-Baptiste parlait, mais nous devons actualiser ainsi son appel à la conversion, pour nous Parole de Dieu.

Une autre chose à remarquer dans la prédication de Jean Baptiste, c’est qu’il n’invite pas à un changement des structures sociales; sa prédication ne portait pas là-dessus. Il ne demande pas aux soldats de quitter l’armée d’Hérode, ni aux collecteurs de l’impôt de quitter leur emploi au service de l’occupant romain. Il leur demande tout simplement d’exercer leur tâche, de remplir leur devoir autrement. Il n’invite personne à tout quitter pour le suivre et à vivre comme lui dans le désert. Tout ce qu’il demande, c’est que chacun, chacune change ses attitudes et ses comportements, devienne vrai, honnête, soucieux, respectueux des autres, accueillant, et ce dans le quotidien de sa vie.

Ce que la Parole de Dieu nous dit en ce dimanche de la joie, c’est que, oui, il est possible que le monde change, que notre société se renouvelle. Qu’on en arrive à la justice pour tous, à du pain, à un toit, à des médicaments pour tous, à la fraternité et à la solidarité partout établies, à l’accueil des gens qui sont chassés de leur pays. Que notre monde devienne meilleur, cela doit être notre espérance. C’est là le projet de Dieu, son dessein sur le monde qui nous est rappelé en ce temps de l’Avent. Mais pour que cela devienne possible, il faut que chaque citoyenne, chaque citoyen, et donc chaque chrétien, chaque chrétienne en ait la conviction et agisse en conséquence dans sa propre vie.

Cet appel à la conversion qui s’adresse à tous et qui inclut des changements réels dans leur comportement social, qui oserait dire qu’on n’a pas besoin de l’entendre aujourd’hui tout autant qu’au temps de Jean-Baptiste, tout autant qu’à l’époque où saint Luc a écrit son évangile. Il faut bien voir que c’est toute la société qui a besoin de se convertir et aussi chacune et chacun de nous.

La foule trouve Jean Baptiste vraiment extraordinaire : ne serait-t-il pas le Messie, celui qu’on attendait ? Non, dit-il aussitôt, je ne le suis pas. Mais il vient, celui qui nous a été promis, il est tout proche. Il est plus puissant que moi : je ne baptise qu’avec de l’eau, lui vous baptisera dans l’Esprit Saint et le feu.

Qu’attendons-nous à Noël ? Un gentil petit enfant qui nous laissera tranquille, qui ne nous dérangera pas ? Non, celui qui vient, c’est le Seigneur et il nous dit : Je vous envoie mon Esprit, le feu de l’amour, le feu de la Pentecôte, pour qu’il vous apprenne à être aimables et justes et vrais et bons. Pour l’accueillir, pour accueillir l’Esprit du Seigneur, l’Esprit du Ressuscité, il nous faut corriger dans notre vie tout ce qui est contraire à l’amour, à l’amour de Dieu, et aussi à l’amour des autres.

C’est alors que pourra se réaliser pour nous ce souhait qui est au coeur de l’Évangile : Soyez dans la joie du Seigneur ! Laissons la Parole de Dieu nous convertir pour que notre sérénité et notre joie fassent de nous des témoins de la miséricorde sans limites de Dieu, seule notre miséricorde les uns à l’égard des autres peut faire venir un monde meilleur dans nos familles, dans nos milieux et partout. Le pape François nous invite, durant cette année qui commence, à ouvrir notre coeur à la miséricorde de Dieu et à laisser sa grâce nous rendre davantage miséricordieux les uns à l’égard des autres.

Marc Bouchard, prêtre

Séminaire de Québec

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